By Barbara

Expo : Medusa -bijoux et tabous-

Bonjour
Un peu plus d’un mois s’est écoulé depuis mon dernier blabla en images, et ce nouvel article m’amène à vous parler, non pas de choux, hiboux, cailloux ou genoux, mais (vous l’aurez sûrement compris) de bijoux.

Ou plus exactement, de revenir sur l’exposition « Médusa, bijoux et tabous » qui, depuis, s’est clôturée, mais qui ne m’empêche en rien de vous en faire encore un peu profiter.
C’est sous un ciel nuageux d’automne que je vous emmène au Musée d’Art moderne de la Ville de Paris, situé dans le XVIᵉ arrondissement, où s’est déroulée cette exposition autour du bijou, traitée d’une manière plus subversive qu’à l’accoutumée. En effet, le bijou est, a priori, raisonnable, rassurant et beau ; or, ici, c’était sa face cachée, avec ses aspects plus sulfureux, qui était mise en lumière et exposée sur le devant de la scène.
Et la lumière fut ! Comme toujours, pour commencer, suivons mon fils, ici accompagné de celle avec qui, jadis, j’aimais tant fouiner parmi ses nombreux colliers…
Nous sommes accueillis par la création The Birth of Sal de Jean-Marie Appriou. Ces grands yeux en verre soufflé, dont une mouche s’abreuve des larmes qui s’en échappent, font écho à la question du regard, celui que le bijou suscite, et celui, pétrifiant, de la Méduse.

Dans la mythologie grecque, Méduse (ou Médusa) est un monstre. Pourtant, à l’origine, il s’agissait d’une très belle femme dont les cheveux abondants rendirent Athéna jalouse. Celle-ci les transforma alors en serpents et donna aux yeux de Méduse le pouvoir de changer en pierre quiconque la regardait. La malheureuse n’avait dès lors plus rien pour attirer le regard, or rappelons que le regard est intimement lié au désir.
Depuis la nuit des temps, le bijou est présent dans toutes les cultures. Tantôt parure, tantôt récompense ou manifestation politique, ses formes et ses usages varient selon l’époque et le lieu de sa création. Connu comme l’un des premiers arts, cet objet au statut particulier fascine par la multiplicité de ses expressions, on l’utilise pour se sublimer, mais aussi comme symbole de l’amour, de l’érotisme, de l’amitié ou du deuil…

Cette grande exposition lui rend hommage, avec pas moins de 400 œuvres présentées tout au long d’un parcours thématisé.
Avant de nous engager vers l’espace dédié aux bijoux, nous découvrons la robe en velours dévoré d’or La Dame du Char de la maison Schiaparelli Haute Couture, ainsi que la robe courte de Paco Rabanne (collection automne-hiver 1968-1969), portée par Brigitte Bardot dans un numéro de Paris Match paru en 1968.
Elle est suivie par la chaîne de corps sado-chic de Betony Vernon, réalisée directement à partir du moulage du corps de Dita Von Teese, puis par la réédition du sautoir en perles de Gabrielle Chanel, et enfin par la tenue de la Garde républicaine portée au Palais du Luxembourg en l’honneur du président du Sénat.
L’exposition Médusa propose une présentation destinée autant aux amateurs de bijoux qu’aux amateurs d’art, ou simplement à tout curieux ! Ici, il s’agit de Spider Woman, une création de Liz Craft.
L’exposition fait cohabiter le fait main et le fait industriel, les bijoux d’artistes et de designers, les créations de bijoutiers contemporains, les pièces de maisons de joaillerie ainsi que des pièces anonymes. On y trouve absolument tous les types de bijoux : les précieux et les fantaisie, les primitifs et les modernes, les antiques et les renaissances, ainsi que ceux plus récents issus de mouvements comme le punk ou le rap.

Ces objets, connus ou méconnus, attisent la curiosité quant à leur utilité ou à leurs usages. Cela commence par le bracelet de naissance et le collier de nouilles, et inclut aussi les bijoux fétiches, censés protéger contre le mauvais œil, tels que les amulettes, talismans, porte-bonheurs, croix, chapelets ou grigris. L’exposition montre également que le bijou peut être un messager, comme le ruban rouge de la lutte contre le sida, ou le badge en forme de main avec le slogan « Touche pas à mon pote » de l’association SOS Racisme.
Débute ici ma sélection : à gauche, la broche Blackbil d’Hanna Hedman, le surprenant Superbitch Bag de Ted Noten, suivi de Optic Topic Mask de Man Ray.
Ci-dessous, le Collier Serpent de Cartier, une commande de 1968 en platine, or blanc et or jaune ; puis, dans un tout autre style, le bracelet en cuir créé par Vivienne Westwood, des bagues en argent de bikers, et un collier de chien en cuir patiné et maillechort datant de la seconde moitié du XIXᵉ siècle.
Ici, la broche Miss Octopus (1966) de Dorothea Tenning, suivie du portrait de la chanteuse Rihanna en couverture de W Magazine de septembre 2016, où elle porte le collier de chien en diamants créé en 1906 par Cartier.
On reste dans le showbiz avec un gant pailleté reconnaissable à la minute, celui porté en 1983 par l’inoubliable Michael Jackson lors de sa tournée Victory Tour. Il s’agit d’une création du costumier des stars Bill Whitten, qui a travaillé au cours de sa carrière avec des noms tels qu’Elton John, Neil Diamond, Lionel Richie ou les magiciens Siegfried et Roy.
Autre époque, avec le bracelet porté par Joséphine Baker dans le film Zouzou de Marc Allégret en 1934.
Plus loin, le public, encore bien nombreux en ce dernier jour d’ouverture, se fraye une petite place pour découvrir les vitrines remplies de trésors.
L’exposition dédie une place particulière aux artistes d’avant-garde et aux créateurs contemporains qui bouleversent les conventions du bijou, comme le montre ci-dessus le Necklace CNN de Thomas Hirschhorn : un collier format géant en carton, papier plastique et papier d’emballage doré, qui pèse dix kilogrammes.
Que dire de cette extension de bec de pigeon, créée en 2007 par Benjamin Lignel ?
Autre originalité : ce câble électrique, gainé de bracelets multicolores, avec bloc multiprise/ballon de football à quatre prises.
Le bijou se manifeste comme un signe d’appartenance communautaire : des dandys aux rappeurs, en passant par les hippies et les bobos, des croyances au sens large du terme, des valeurs culturelles ou rituelles, sacrées ou profanes, et même sexuelles avec le bijou érotique. Justement, c’est à l’abri des regards et derrière un rideau noir que l’on découvre, dans une petite pièce obscure, l’intrigant coffret d’accessoires érotiques Back-Room de Betony Vernon.
Changement de genre avec ce collier dont les couleurs et l’originalité permettent d’identifier facilement qu’il provient tout droit de l’imaginaire de la regrettée Niki de Saint Phalle.
Du bracelet-bouche d’Alina Szapocznikow, on passe à la couronne faite à partir de plastique, de métal blanc et doré, de velours et de faux cristaux, provenant du défilé automne-hiver 2000-2001 de Vivienne Westwood.
Avant de quitter l’exposition, rapprochons-nous de cet attirant tableau situé tout au fond…
Il s’agit de Memory Ware Flat #17, une œuvre réalisée en 2001 par Mike Kelley. Sur un panneau de bois de 215,9 × 317,5 × 15,2 cm, nos yeux se baladent sans fin dans ce labyrinthe composé d’une profusion de petits objets de notre société : pendentifs, clés, badges, pins, et une multitude de colliers. Tous sont ici collés pour former cette immense mosaïque, certes un peu kitsch, mais qui restera mon véritable coup de cœur de l’exposition. Sans doute en raison de mon goût prononcé pour les collages, dont le rendu s’apparente à cet aspect, ou peut-être par l’impression que toutes ces bricoles ont une seconde chance, une seconde vie en étant ici plutôt qu’au fond d’une caisse : une manière de faire ressusciter la petite fille, le scout, le militant… enfin bref, tous ceux qui les ont portés.
Hors de l’expo Médusa, nous allons observer de plus près les merveilleuses couleurs de La Fée Électricité. Cette décoration monumentale, de 10 × 60 mètres, réalisée par de nombreux artistes dont notamment Fernand Léger, Robert Delaunay et Raoul Dufy, avait été créée à l’origine pour l’Exposition internationale de 1937 afin de raconter l’histoire de l’électricité. On y trouve les portraits de 110 savants et inventeurs ayant contribué au développement de l’électricité, ainsi que des personnages de la mythologie grecque.
Nous sortons du musée. Sous la grisaille, le spectacle continue encore, avec sa belle architecture, ses hommes et femmes attablés se réchauffant autour d’une tasse de thé ou de café, sans oublier la Dame de Fer que nous ne pouvons pas manquer.
Avant de nous engouffrer dans le métro parisien, nous l’avons regardée au loin, même si nous la connaissons bien, comme une sorte de rituel obligatoire. D’autres, à nos côtés, venaient de loin pour la rencontrer. C’en était presque touchant de les voir en famille, avec dans leurs yeux cette flamme qui brille et qui n’appartient qu’à ceux qui ne sont pas indifférents à sa silhouette, reconnaissable même au cœur de la nuit.
Mais la flamme révèle plusieurs facettes, et l’emplacement où nous nous trouvons vole brièvement la vedette à la tour Eiffel en raison de sa tragique signification, dont nul n’ignore la raison. C’est alors qu’un timide rayon de soleil vient se poser là, donnant presque vie à ce feu autour duquel les gens se tiennent silencieusement. On peut y lire le mot LOVE, ainsi qu’une petite peluche en forme de cochon rose, délicatement posée pour la princesse des cœurs, Lady Diana. En ce lieu de pèlerinage, à proximité du fatal tunnel du pont de l’Alma, on trouve encore, vingt ans plus tard, des témoignages émouvants au sol et des roses déposées en hommage.
Comme je n’ai pas l’intention de terminer mon article sur une note aussi dramatique, et qu’initialement, j'étais venue pour vous parler de bijoux, à l’approche imminente du 24 décembre, je vous partage un souvenir de mon Noël 1990. Du haut de mes 13 ans, c’était le bonheur absolu de recevoir en cadeau un recueil de photos de cette Norma Jeane, alias Marilyn, que je trouvais si fascinante et qui me disait en chanson : « Diamonds are a girl’s best friend ». Je ne sais pas si, réellement, les diamants sont les meilleurs amis des femmes, d’ailleurs, 27 ans plus tard, je n’en ai pas un seul. Qu’importe, j’ai toujours cette perle rare et précieuse, ici à droite de l’image, à qui je chipais ses grosses breloques pour me déguiser (il n’y a qu’à bien l’observer pour comprendre que ce que je vous dis n’est pas du toc !). Voilà, ainsi la boucle est bouclée, comme toujours, je ne pouvais pas me contenter d’écrire uniquement sur un musée…

Bonnes fêtes à toutes et à tous, et haut les cœurs ! 💗

Barbara
© crédits photo By Barbara

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