By Barbara

Souvenirs de Venise, la place Saint- Marc

Bonjour

"Laisse les gondoles à Venise", chantaient en chœur Sheila et Ringo. Eh bien, moi, comme vous le constaterez, je ne les ai pas encore laissées dans une boîte à souvenirs, et je reviens encore vers vous pour un nouvel épisode !

Pour ceux qui l'auront remarqué à travers mes clichés, j'aime tout photographier, le plus souvent des situations ou des choses anodines, et c'est nettement dans ces moments-là que je vis pleinement ma passion. De toute évidence, je préfère saisir un moment inattendu et authentique plutôt que d'aller faire du coude à coude devant un monument figé depuis un siècle. Et pourtant ! Venise aura fait voler tout cela en éclats, car c'est un carnaval permanent de beauté à observer, où tout le monde ramène finalement la même photo souvenir, notamment celle de la place Saint-Marc, qui est l'endroit phare à ne pas rater.

Pour vous donner un peu l'état d'esprit du moment, nous sommes à notre troisième jour de visite. C'est un samedi, autour de 19 h, et nous venons de sortir du Palais de la Ca' d'Oro, qui m’aura bien rempli la tête en le photographiant sous tous les angles. Je dis alors à mon mari ainsi qu'à mon fils que nous devons impérativement nous rendre sur la place Saint-Marc avant de quitter Venise le lendemain, surtout qu'au même moment le soleil s'éloigne de plus en plus. Nous y allons donc tranquillement, vu l'état de nos pieds tout ramollis, et la fatigue nous gagne doucement mais sûrement ! On se dit que ce n'est rien qu'une place, qu'il n'y a pas de quoi y rester des heures, ni utiliser toute ma carte mémoire de photos pour ça non plus. Pffff… erreur, grosse erreur de novice d'avoir pensé cela !

Car, une fois sur place, tout a disparu… ou plutôt réapparu ! Je vous parle de mon énergie de lionne et des étoiles dans les yeux que l'endroit procure inévitablement.

"La Piazzetta San Marco" nous accueille avec ses deux colonnes en granit : le lion de Saint-Marc à gauche et, à droite, celle de Saint Théodore. J'ai lu que les Vénitiens ont pour superstition de ne jamais passer entre ces deux colonnes, car c'était le lieu d’exécution publique ! De part et d’autre de la Piazzetta se trouvent la Biblioteca Marciana, qui est l'une des plus grandes bibliothèques d’Italie, et, ici à gauche, le fameux Palais des Doges.
L’édifice du Palais des Doges était jadis le siège de tous les pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire de Venise et fut ainsi la résidence officielle du Doge de la République de Venise. Jusqu’au XVIᵉ siècle, le monument cachait sous ses toits un très lourd secret : il abritait une prison secrète appelée « les Plombs », en raison des toits recouverts de plaques de plomb. Pour la petite histoire, le Palais des Doges fut également le lieu de résidence d’un célèbre prisonnier nommé Casanova, mais le 1ᵉʳ novembre 1756, Casanova réalisa ce que personne n’avait jamais encore osé tenter dans la prison du Palais des Doges : une évasion ! Elle est la seule évasion connue dans la prison du Palais.
De nos jours, l'intérieur du Palais des Doges est un musée, avec de magnifiques fresques monumentales qui ornent les salles du palais, ainsi que de nombreux tableaux de maîtres et des sculptures à foison.
Face au Palais des Doges, le campanile (que les Vénitiens prénomment « le maître des maisons ») est vraiment l'emblème de la ville. Sa construction remonte à 888 ! Il connut de nombreux désastres : plusieurs écroulements et divers incendies. Souvent détruit, mais toujours reconstruit, grandi et modifié au fil des siècles, il prit son aspect définitif au XVIᵉ siècle, avant de s'écrouler un matin de 1902, sans faire de victimes ! Il a été reconstruit à l'identique quelques années plus tard. On ne peut pas le rater avec ses 98 mètres de hauteur, abritant cinq cloches et un ange doré qui domine le tout. De toute évidence, c'est l'endroit privilégié pour admirer Venise de très haut.
Tandis que le ciel se couvre de plus en plus de nuages, nous nous rapprochons de la Piazza San Marco. C’est l’une des places les plus connues du monde. Elle est assez grande (175 mètres de long et 82 de large), et la grande tradition touristique est d’y nourrir les pigeons. Elle est bordée de deux bâtiments en longueur : les Procuraties Vecchie et Nuove (anciens bureaux des plus hauts fonctionnaires de Venise, les procurateurs) et l'aile Napoléon. Ces bâtiments comportent des arcades qui abritent des boutiques chics, des cafés et le Musée d’Archéologie.
Donnant sur la place, on admire également la tour de l'horloge, qui indique les heures, les phases de la lune, mais aussi les signes du zodiaque. Au-dessus de l'horloge se trouvent une statue de la Vierge, un lion de Saint-Marc, et, au sommet, deux statues de Maures de près de trois mètres de haut, frappant une cloche toutes les heures.
Et enfin, la sublime Basilique Saint-Marc, la plus imposante de tout Venise. Construite en 828, puis reconstruite après l'incendie qui ravagea le Palais des Doges en 976, sa façade présente de nombreux détails riches et raffinés, notamment les mosaïques que l'on peut observer à l'intérieur de chaque arche. Ses cinq coupoles et son influence byzantine lui donnent un cachet vraiment unique. Hélas, elle semblait fermée, ou pas accessible, sûrement en raison de la montée de l'eau qui, petit à petit, se propageait partout…
Alors, avant que l'eau ne gagne toute la place Saint-Marc, je suis allée saluer les pigeons, qui se fichaient bien de ma présence, n'ayant pas la moindre miette à leur offrir ! Ce fut différent pour ceux qui ne se privèrent pas de les gâter, faisant la joie des vendeurs de graines… et cela malgré l'interdiction de les nourrir, la fiente causant trop de ravages.
Les pigeons sont principalement sur la place, mais j'en ai vu un plus malin que les autres, allant directement se servir dans les plats du si joli café Florian ! Une adresse prestigieuse et emblématique, située sous les arcades. Si cette adresse est aussi un monument historique, c’est tout d’abord parce que c'est l'un des 24 cafés de la fin du XVIIIᵉ siècle à avoir survécu. Ce café a été fréquenté par une clientèle aussi élégante que renommée. Pensez donc ! On pouvait y voir les hauts magistrats de la République, des artistes et des écrivains comme Goethe, Musset, George Sand, Wagner, Proust ou Balzac. Le Florian est aussi réputé en raison de son décor intérieur, les quatre petites salles, réalisées en 1858, évoquent un atrium grec, un fumoir Renaissance, un salon mauresque et un salon Pompadour.
Les heures passent, je me balade encore en famille autour de la place, tant il y a toujours autre chose à découvrir.

Nous nous éloignons un peu et longeons les bords de la lagune, si belle et apaisante…
Mais c'est avec stupeur et agacement que mon moment d'extase fut perturbé par l'arrivée soudaine de cet imposant paquebot, qui n'a rien à faire là ! En dévorant tout sur son passage, il met la ville en danger par les 28 millions de touristes qui arrivent à bord de ce monstre des mers (300 m de long, 32 m de large, 60 m de haut, rien que ça !) paradant devant la place Saint-Marc. Pour mieux comprendre la gravité de la situation, il faut avoir à l'esprit que Venise est un joyau de 6 km², composé de 118 îlots et 177 canaux, réunis par 400 ponts, hérissé de palais, de couvents et d'églises restés dans leur jus. Classée patrimoine mondial de l'Unesco depuis 1987, la cité bâtie sur pilotis est menacée par ce tourisme de masse, déversé chaque semaine par une trentaine de paquebots de croisière faisant escale au bout du Grand Canal. Cela provoque un déplacement d’eau assez conséquent pour faire trembler la Basilique Saint-Marc. La petite ville de 56 000 habitants souffre donc de recevoir tant de monde, et les dégradations sont irrémédiables. Le Grand Canal est devenu une autoroute embouteillée par les vaporettos, bateaux à moteur, taxis et gondoles, lesquels provoquent des ressacs calamiteux pour les palais, dont les fondations de pierre ou de brique sont peu à peu rongées par le sel. Sans parler des 30 000 tonnes de déchets annuels à évacuer ! Bref, de quoi frémir et soupirer un bon coup.
Avec ça, je préfère ne plus contempler la vue du canal de la Giudecca et m'en vais retrouver la place Saint-Marc. Quitte à soupirer, autant que ce soit face au pont des Soupirs, qui est juste à côté du Palais des Doges ! Ce pont est l'un des plus célèbres de Venise et le seul qui soit couvert. Il est devenu un lieu de rendez-vous pour les amoureux en gondole, qui ont pris l’habitude de s’embrasser dessous. Pourtant, le pont des Soupirs ne doit pas son nom à une quelconque origine romantique. Il relie le Palais des Doges aux prisons, les accusés étaient jugés dans le Palais avant d'être enfermés. Le pont est ainsi nommé car les prisonniers le traversaient pour aller à leur exécution et, en regardant une dernière fois par la lucarne, poussaient un dernier soupir.
Finalement, nous ne voulons plus partir, car d'heure en heure, Venise nous éblouit par son habit de lumières et nous surprend par sa montée des eaux, au point de n'avoir plus d'autre choix que de retirer nos chaussures pour avancer. On nomme ici cette crue « l'acqua alta ». Elle est la résultante de plusieurs phénomènes simultanés et imprévisibles, comme une marée importante, les pluies abondantes ou un fort vent du sud. En 1966, une marée a bien failli engloutir Venise. Pour éviter le retour d'une telle catastrophe, le projet Mose a été mis en place. Ce projet consiste à installer des digues flottantes et articulées aux trois bouches de communication de la lagune avec l'Adriatique. Ainsi, dès que le niveau d'alerte sera supérieur à 1,10 m, on fermera ces écluses amovibles pour protéger Venise et sa lagune des marées exceptionnelles. Les travaux sont toujours en cours et devraient être terminés à la fin de l'année 2018. Le coût final du projet est évalué à 5,5 milliards d'euros. C'est un projet qui a été largement contesté à Venise. Selon certains, il est absurde de traiter la conséquence plutôt que l'origine de ces marées hautes destructrices, qui ne sont pas uniquement provoquées par les phénomènes météorologiques : des « autoroutes » ont été creusées autour de Venise pour permettre l'accès des ports aux navires de gros tonnage. Je vous parle bien de l’affreux immeuble flottant que j'évoquais plus haut… La course contre la montre est donc engagée.
L'acqua alta n'est pas quotidienne : la période à risque est généralement du 15 septembre au 15 avril chaque année… et nous sommes ce soir-là le 18 juin. Alors, je profite de cette occasion pour avoir terminé ma série de photos les pieds dans l'eau, comme une formidable surprise offerte par Venise. Cette soirée, la dernière passée à Venise, fut vraiment un cadeau féérique pour mon mari et moi (sans oublier Elliot, le fruit de notre amour !), puisque nous étions là pour célébrer nos dix ans de mariage. Ce fut ainsi un moment très amusant, assez rafraîchissant et surtout un voyage inoubliable que nous préserverons du mieux possible dans notre irremplaçable boîte à souvenirs.
Cette fois, nous quittons définitivement la place Saint-Marc, il est temps de plier nos bagages et de retrouver Paris.

Mais j'y pense ! Figurez-vous qu'il manque, à travers mes quatre articles consacrés à Venise, encore un endroit que vous n'avez pas vu… Quand il n'y en a plus, avec moi, je vous le dis, il y en a toujours encore !

Alors, restez connecté pour prochainement découvrir mon ultime reportage photo.

Ne dit-on pas que le meilleur est pour la fin ?⛵🌞🏠🎨❤️

Barbara
© crédits photo By Barbara

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